Le phare
Création à Paris au Théâtre du Marais en septembre 2001.
Mise en scène : Nicole Aubry.
Assistante : Élodie Demey.
Lumière : Bertrand Couderc.
Son : Guillaume Siron.
Avec : Clément Sibony.
PRIX DU SOUFFLEUR 2002
Mise en scène : Nicole Aubry.
Assistante : Élodie Demey.
Lumière : Bertrand Couderc.
Son : Guillaume Siron.
Avec : Clément Sibony.
PRIX DU SOUFFLEUR 2002
Une île. Un homme accroché à un phare qu’il n’a jamais quitté. Auprès de lui, un père, un frère, une vie ajustée aux saisons et aux jours : un chien, quelques lapins à piéger, l’horizon obsédant. Ce petit monde bascule le jour où le frère disparaît sans raison. Le trouble envahit le personnage et fait vaciller ses repères. Mais son entêtement, entre enfance et folie, le laissera debout, ardent, dans les derniers feux du phare.
[ Sur Théâtre Online ] Le Phare a été créée en septembre 2001 au Théâtre du Marais, mise en scène par Nicole Aubry, avec le comédien Clément Sibony. La pièce est lauréate du Prix du Souffleur 2002 et des Journées d’auteurs de théâtre de Lyon. Elle a aussi été présentée lors de la Journée des écritures contemporaines organisée et diffusée par France-Culture au Festival d’Avignon 2002. Elle est traduite en plusieurs langues et a été jouée en Russie, Lituanie, Pologne et au Canada. Il collaborera à sa traduction en anglais, lors de la Banff PlayRites Colony, au Canada, en 2004.
Je voulais faire le récit d'une solitude, ignorante du reste du monde, peuplée de souvenirs minuscules, de rochers, d'oiseaux. Et puis est venu tout un théâtre d'ombres : un père, un frère, des lapins, des joies rituelles, la peur. Des figures animées par cette voix aux mots clairs et nus, qui peut tout faire surgir, et détruirait tout si elle s'éteignait.
Mon petit théâtre de mots tient à ce fil. C'est un théâtre de la fragilité. Dans l'écriture de la pièce, pas un mot n'échappe à cette voix.
Pas un mot pour dire il fait un pas à gauche et regarde par la fenêtre, avec de belles italiques penchées jusque par terre. Pas un mot pour décider si la scène se passe à Cordouan, ou bien à Ouessant, ou dans une maison de fous.
Car c'est encore cette voix obstinée qui, à elle seule, va dessiner autour du personnage un temps, un décor, un monde chancelant. Je voulais que ce monde nous devienne familier et que cette voix propage la peur de perdre.
Timothée de Fombelle
Juin 2001
On ne sait ni son âge ni son nom. Aucune importance. Ce qui importe, c'est l'urgence de dire pour lui-même, pour être deux, pour être cent, son monde bouleversé où tout menace de s'arrêter. Chaque image, chaque souvenir, presque rien, devient un univers entier, un univers peuplé, vibrant, ébranlé par des chocs, des ruptures et des pertes. Par moment tout se brouille. Le souffle est suspendu dans le silence. La vie semble s'arrêter brutalement puis elle revient, goulue et joyeuse. Partager l'étonnement, le rire et la révolte devant l'inconcevable réalité, dans l'île au phare ou quelque part ailleurs, entendre cette petite voix qui pourrait être la nôtre, laisser s'éteindre un phare et s'allumer la vie. Tout doucement des yeux se ferment, peut être pour échapper, peut être pour mieux voir.
Nicole Aubry
Juin 2001
Mon petit théâtre de mots tient à ce fil. C'est un théâtre de la fragilité. Dans l'écriture de la pièce, pas un mot n'échappe à cette voix.
Pas un mot pour dire il fait un pas à gauche et regarde par la fenêtre, avec de belles italiques penchées jusque par terre. Pas un mot pour décider si la scène se passe à Cordouan, ou bien à Ouessant, ou dans une maison de fous.
Car c'est encore cette voix obstinée qui, à elle seule, va dessiner autour du personnage un temps, un décor, un monde chancelant. Je voulais que ce monde nous devienne familier et que cette voix propage la peur de perdre.
Timothée de Fombelle
Juin 2001
On ne sait ni son âge ni son nom. Aucune importance. Ce qui importe, c'est l'urgence de dire pour lui-même, pour être deux, pour être cent, son monde bouleversé où tout menace de s'arrêter. Chaque image, chaque souvenir, presque rien, devient un univers entier, un univers peuplé, vibrant, ébranlé par des chocs, des ruptures et des pertes. Par moment tout se brouille. Le souffle est suspendu dans le silence. La vie semble s'arrêter brutalement puis elle revient, goulue et joyeuse. Partager l'étonnement, le rire et la révolte devant l'inconcevable réalité, dans l'île au phare ou quelque part ailleurs, entendre cette petite voix qui pourrait être la nôtre, laisser s'éteindre un phare et s'allumer la vie. Tout doucement des yeux se ferment, peut être pour échapper, peut être pour mieux voir.
Nicole Aubry
Juin 2001
Avis
Aucun.
Peut-être un jour ?
Peut-être un jour ?
Autres avis:
Une oeuvre touchante, au delà de la performance du comédien (qui est déroutante de générosité et d'efficacité), une histoire, superbe, dont chaque image nous apparait au son des mots du protagoniste. Plus qu'une oeuvre à voir, une oeuvre à vivre. Dav31
Un homme est seul sur un phare. On ne sait ni son nom ni son âge. Durant une heure, il nous raconte l’histoire de sa vie. Un quotidien atrocement vide et pourtant si plein de joies minuscules. Un beau texte servi par un bel acteur très prometteur, mais dans une mise en scène, hélas, un peu froide et convenue.TheatreOnline (l'avis en entier)
Un homme est seul sur un phare. On ne sait ni son nom ni son âge. Durant une heure, il nous raconte l’histoire de sa vie. Un quotidien atrocement vide et pourtant si plein de joies minuscules. Un beau texte servi par un bel acteur très prometteur, mais dans une mise en scène, hélas, un peu froide et convenue.TheatreOnline (l'avis en entier)
Extrait
Mon frère a lu un livre un jour qui disait que le ciel et la mer s’emmêlent aussi parfois et qu’il y a plus d’horizon. C’est faux.
Je reste parce que l’horizon reste. La mer et le ciel ne sont jamais ensemble. Mon frère a cru le livre qui disait le contraire mais c’était faux. La mer, c’est aiguisé, c’est pointu comme la roche. Le ciel est rond, tout rond. On peut pas les confondre.
Où le pointu crève la courbe, à cet endroit, c’est l’horizon.
C’est pour cet endroit que je reste.
Quand je vois plus l’horizon, soit qu’il se gonfle comme le ciel, ou qu’il s’écorche comme la mer, quand il y a plus l’horizon, je vais dormir, pour le retrouver, pour pas faire comme mon frère. Je laisse le gris, le vent, pour pas perdre l’horizon. C’est là que je suis malade et que j’allume la lampe même le jour.
Mon père reste ces jours dans le phare ou autour. Les autres jours, une heure le matin, une heure le soir, il visite ses collets à l’autre bout de l’île, côté buisson d’épines. Il prend des lapins.
Les lapins sont seuls avec les oiseaux et nous sur l’île. Le chien est mort en décembre.
C’est mon père qui a mis les lapins en arrivant. Trois lapins. Deux femelles et un mâle. Depuis, l’île est un clapier, avec cent lapins au moins, et nous, et les oiseaux. Les seuls à s’en aller, les oiseaux, à revenir, à partir. Ils sont sur les falaises, posés ou envolés, à rappeler l’écume de la mer par taches blanches sur la pierre, à force de fiente et de plumes.
Le chien est mort en décembre.
Il est mort sous la pluie. De rien a dit mon père. Il est mort de rien. Pas vieux pas malade, il est mort, point.
J’ai peur de mourir de rien les jours où je perds l’horizon.
Je reste parce que l’horizon reste. La mer et le ciel ne sont jamais ensemble. Mon frère a cru le livre qui disait le contraire mais c’était faux. La mer, c’est aiguisé, c’est pointu comme la roche. Le ciel est rond, tout rond. On peut pas les confondre.
Où le pointu crève la courbe, à cet endroit, c’est l’horizon.
C’est pour cet endroit que je reste.
Quand je vois plus l’horizon, soit qu’il se gonfle comme le ciel, ou qu’il s’écorche comme la mer, quand il y a plus l’horizon, je vais dormir, pour le retrouver, pour pas faire comme mon frère. Je laisse le gris, le vent, pour pas perdre l’horizon. C’est là que je suis malade et que j’allume la lampe même le jour.
Mon père reste ces jours dans le phare ou autour. Les autres jours, une heure le matin, une heure le soir, il visite ses collets à l’autre bout de l’île, côté buisson d’épines. Il prend des lapins.
Les lapins sont seuls avec les oiseaux et nous sur l’île. Le chien est mort en décembre.
C’est mon père qui a mis les lapins en arrivant. Trois lapins. Deux femelles et un mâle. Depuis, l’île est un clapier, avec cent lapins au moins, et nous, et les oiseaux. Les seuls à s’en aller, les oiseaux, à revenir, à partir. Ils sont sur les falaises, posés ou envolés, à rappeler l’écume de la mer par taches blanches sur la pierre, à force de fiente et de plumes.
Le chien est mort en décembre.
Il est mort sous la pluie. De rien a dit mon père. Il est mort de rien. Pas vieux pas malade, il est mort, point.
J’ai peur de mourir de rien les jours où je perds l’horizon.
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